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SIMBIOS
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Je vous propose un nouveau volet sur les crises environnementales : on va parler cette fois-ci de l’utilisation de l’eau.

Introduction

En France l’été 2022, nous avons connu une grosse période de sécheresse :

  • ravitaillement d’un millier de communes par camions citernes
  • mesures de restriction de l’usage de l’eau
  • incendies

Cet été a peut-être permis aux Français.e.s de se rendre de compte que l’eau n’était pas forcément quelque chose qui coulait de source pour nous.

Comment fonctionne le cycle de l’eau ? Quelles sont nos réserves ?

Sur Terre, nous avons majoritairement (97%) de l’eau salée (dans nos mers et océans). Cependant nous avons plus souvent besoin d’eau douce. La grande majorité des réserves d’eau douce est inexploitable (glaciers, nappes non renouvelables…). Nous ne puisons notre eau que dans les cours d’eau (lacs et rivières) ou dans les nappes renouvelables qui représentent moins de 2% des reserves d’eau douce.

Graphiques présentant la répartition des réserves d'eau dans le monde.

Source : Eau’dyssée.

L’eau circule naturellement entre ces réserves en fonction de la météo (évaporation, précipitation, absorption, ruissellement…)

Quels sont les différents usages de l’eau

En France, on distingue principalement 4 usages :

Usage Prélèvements Restitution
Energie 61% 95%
Agriculture 19% 10%
Industrie 11% 90%
Domestique 9% 75%
  • Pour la production d’électricité, on utilise de de l’eau pour refroidir les réacteurs nucléaires ou thermiques. L’eau est quasiment intégralement restituée au milieu de son prélèvement mais elle est plus chaude.
  • En agriculture l’eau est prélevée dans les rivières et les nappes pour les cultutres. L’eau est donc transférée vers les sols et la biosphère.
  • L’industrie et les usages domestiques complètent les usages de l’eau. L’eau est prélevée dans les nappes (65%) et les cours d’eau (35%). Elle est ensuite restituée dans les rivières. Cela engendre un problème puisque les nappes constituent un réservoir stable, là où les rivières s’écoulent et finissent dans la mer où elle ne sert plus (ou presque) aux besoins humains.

Y a-t-il d’autres perturbations du cycle de l’eau ?

Les activités humaines ont tendance à favoriser le ruissellement. Au lieu d’être absorbée par le sol pour nourrir la biosphère ou remplir les nappes phréatiques, l’eau issue des précipitations rejoint rapidement les cours d’eau.

Comme évoqué plus haut, l’eau des cours d’eau s’écoule rapidement vers les mers et océans et ne constitue donc pas une reserve pérenne pour nos usages.

Le ruissellement est accentué par :

  • l’artificialisation des sols
  • la déforestation
  • l’assèchement des sols (qui est augmenté par le réchauffement climatique)

Quelles sont les limites de consommation soutenable ?

Les prélèvements anthropiques de l’eau sont divisés en 3 catégories :

  • l’eau verte : l’eau de pluie consommée
  • l’eau bleue : l’eau extraite de réserves (nappes ou cours d’eau) et non restituée
  • l’eau grise : de l’eau qui a été polluée avant d’être restituée

La consommation d’eau pour les besoins humains est de l’ordre de 10 000 Gm³ par an. Cela représente 1 385 m³ par an et par habitant. Evidemment il y a des disparités : par exemple la consommation d’un américain est de 2 842 m³.

La répartition au niveau monde est bien différente de la répartition française mentionnée dans le tableau plus haut. Le gros de la consommation provient de l’agriculture (92%) dont 27% pour la production de céréales, 22% pour la production de viande et 7% pour le lait. L’industrie (4.4%) et les usages domestiques (3.5%) pèsent bien moins lourd. Les données de la consommation d’eau mondiale sont issues de cette étude .

En 2022, une étude relayée par nature.com et Stockholm Resilience Centre révélait que les prélèvements d’eau verte (donc l’eau de pluie) avaient dépassé la limite planétaire. Quelques mois plus tard, une étude publiée dans Science montrait que la limite planétaire d’eau bleue était également franchie.

Quel est la place du numérique dans la consommation d’eau ?

Le numérique consomme beaucoup d’eau notamment lors de la phase de raffinage du minerai en métaux. Par exemple, la fabrication d’un smartphone nécessite 12 760 L d’eau ( source ). Au total, le numérique représente près de 5% des besoins mondiaux de l’industrie ( source ).

J’adore l’eau ! Dans 20-30 ans, il n’y en aura plus…

Jean-Claude Van Damme, précurseur d’une méthode Aware (en 2010 )

Malheureusement cette utilisation de l’eau a généralement lieu dans des régions qui sont déjà en stress hydrique et aggrave donc une situation qui était déjà délicate. Pour prendre cet effet en compte dans les analyses du cycle de vie, on parle généralement en m³ world eq. Cette unité prend en compte les réserves d’eau et la demande d’eau sur le lieu de prélèvement et traduit cela en un prélèvement normalisé sur Terre. C’est la méthode AWAREAvailable WAter REmaining.

Le prélèvement d'un même volume ne compte pas autant en fonction des réserves d'eau.

La différence dans le m³ world eq en fonction du lieu de prélèvement ( source )

Cette méthode s’est imposée relativement récemment et n’avait malheuresement pas été utilisée dans les études de l’impact environnemental du numérique.

Que peut-on faire pour améliorer les choses ?

A l’échelle individuelle

Pour la consommation locale, on peut diminuer notre consommation d’eau du robinet :

  • Privilégier les douches aux bains. Prendre des douches plus rapides
  • Utiliser des toilettes économes en eau voire des toilettes sèches
  • Privilégier le lave-linge et le lave-vaisselle (en mode éco) moins consommateurs en eau que le lavage manuel
  • Réutiliser de l’eau domestique pour arroser le jardin
  • voir toutes les idées proposées par Eau’dyssée .

Pour la consommation planétaire, il faut faire attention à son empreinte eau. Pour cela il faut connaître quelques ordres de grandeur :

Produit Empreinte eau
Une pinte de bière 150 L
200g de boeuf 3 000 L
un oeuf 200 L
Une pomme 120 L
300g de patates 85 L
60g de riz 150 L

Voir l’ empreinte eau d’autres produits .

Comme souvent (toujours ?) pour l’environnement, la méthode la plus efficace est de faire preuve de sobriété dans son mode de vie.

A l’échelle collective

  • Il est nécessaire de revoir notre manière d’aborder l’agriculture
    • Choix de cultures appropriées aux précipitations locales
    • Moindre travail du sol
  • Arrêter la déforestation
  • Limiter l’imperméabilisation des sols

Pour aller plus loin

Il n’est question ici que de la quantité d’eau disponible. Un autre paramètre à prendre en compte est la qualité de l’eau disponible. Cela a été traité dans cet article dédié.

Pour aller plus loin, je vous invite à :

Remerciements

Un grand merci à Stéphane Fourneret pour ses explications et la relecture de cet article.

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